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Violence entre résidents, certificat initial et responsabilité applicable

Rappel de l'objet de la demande

Faut-il rédiger un certificat médical initial après un épisode de violence entre résidents ? De plus, quelle est la responsabilité applicable (pénale et civile) dans ce type de situation ?

Textes de référence

  • Code de la santé publique (CSP) : articles L. 1110-1, L. 1110-4, L. 1111-7, L. 1142-1, L. 6111-1, R. 1112-49, R. 4127-4 ;
  • Code pénal (CP) : articles 121-1, 122-1, 222-9, 222-10, 222-11, 222-12, 226-13, 226-14 ;
  • Code civil (CC) : article 1240, 414-3 ;
  • Décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l’état civil.

Réponse

Rédaction d’un certificat médical initial suite à une situation de violence entre résidents

Selon la HAS, le certificat médical initial (CMI) « est un constat médico-légal et fait partie des éléments qui permettront d’attester devant la justice du préjudice subi par la victime ».

Cependant, ce certificat particulier n’est pas prévu par le Code de procédure pénale, et c’est donc la HAS qui en définit les contours, notamment dans des recommandations de pratique clinique.

Au sein de ce CMI, le médecin doit « décrire avec précision et sans ambiguïté les signes cliniques positifs de toutes les lésions ».

Pour déterminer l’ITT, le médecin doit en outre prendre en considération les éléments suivants :

  • « L’évaluation de l’ITT s’applique aux troubles physiques et psychiques, sources d’incapacité, c’est-à-dire à toutes les fonctions de la personne ;
  • L’incapacité ne concerne pas le travail au sens habituel du mot, mais la durée de la gêne notable dans les activités quotidiennes et usuelles de la victime (perte des capacités habituelles de déplacement, des capacités habituelles de communication, de manipulation des objets, altération des fonctions supérieures, dépendance à un appareillage ou à une assistance humaine), notamment : manger, dormir, se laver, s’habiller, sortir pour faire ses courses, se déplacer, jouer (pour un enfant). La période pendant laquelle une personne est notablement gênée pour se livrer à certaines des activités précitées est une période d’incapacité ;
  • L’évaluation de l’ITT ne doit pas dépendre du courage ou de la situation sociale du plaignant ;
  • L’évaluation du retentissement psychologique en termes d’ITT est parfois délicate. Le certificat médical gagne en efficacité si le médecin indique des durées précises de perturbations des actes de la vie courante ;
  • dans tous les cas, c’est bien l’appréciation globale du retentissement fonctionnel des lésions ou des troubles induits par les violences sur les gestes de la vie quotidienne qui doit être prise en compte ;
  • De ne pas confondre l’ITT avec d’autres notions : le déficit fonctionnel temporaire (notion de droit civil), l’arrêt de travail de la Sécurité sociale permettant le calcul d’indemnités journalières ;
  • De mentionner sur la feuille de soins le caractère causé par un tiers de l’accident
  • La durée d’hospitalisation ne doit pas être considérée comme un critère d’évaluation de la durée de l’ITT, mais il est utile de la mentionner si elle a eu lieu ».

La HAS recommande également de faire état de la particulière vulnérabilité de la victime dans le CMI.

Il faut donc, dans le cadre du CMI, prendre en compte les habitudes de la victime, antérieures à l’accident ou aux violences, et définir le temps pendant lequel la victime a perdu la capacité de reprendre ces habitudes.

Cependant, le CMI ne peut être demandé que spontanément par la victime, ou son représentant légal s’il s’agit d’un mineur ou un majeur protégé. Le médecin ne peut pas, dans ce cas, refuser d’établir un CMI mais peut demander des avis cliniques supplémentaires et/ou adresser la victime à une consultation spécialisée. Le CMI peut en outre être demandé sur réquisition judiciaire.

Dans ce cas, s’il ne s’estime pas suffisamment compétent, ou s’il considère être dans une situation de conflit d’intérêts, le médecin doit contacter l’autorité requérante pour demander à être dessaisi, voire à ne pas être saisi.

Du reste, et conformément aux principes régissant la déontologie médicale, de tels documents doivent être établis « conformément aux constatations médicales [que le médecin] est en mesure de faire ». Autrement dit, le médecin ne peut constater que des faits qu’il a personnellement et cliniquement constatés, sans qu’il puisse lui être reproché de ne pas avoir excédé le champ, non seulement, de ses propres constations mais aussi de ses propres compétences.

Concernant la communication du certificat médical initial, la HAS recommande de remettre le CMI à la victime examinée directement, ou, le cas échéant, à son représentant légal ; et dans le cas d’une réquisition, au service requérant et aux services enquêteurs (si la réquisition le prévoit). Dans ce cas, une copie peut être remise à la victime, avec autorisation de l’autorité requérante. La HAS indique également de ne jamais remettre le certificat médical à un tiers.

Communication d’un certificat médical initial à qui de droit

Il ressort du paragraphe précédent que les tiers ne peuvent obtenir communication du CMI. Or, les ayants droit peuvent obtenir communication des éléments du dossier médical d’un patient dans les conditions suivantes.

Tout d’abord, l’article L. 1110-4 alinéa 1 du CSP dispose que :

« Toute personne prise en charge par un professionnel de santé, un établissement ou service, un professionnel ou organisme concourant à la prévention ou aux soins dont les conditions d’exercice ou les activités sont régies par le présent code, le service de santé des armées, un professionnel du secteur médico-social ou social ou un établissement ou service social et médico-social mentionné au I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles a droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant. ».

Toutes les informations auxquelles le professionnel de santé aura accès, que ce soit par écrit ou à l’oral, sont couvertes par le secret médical, et de ce fait protégées . Ce droit est dans l’intérêt des patients, et justifié par le droit au respect de la vie privée.

La révélation d’informations couvertes par le secret médical est punie par le Code pénal d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Il existe des exceptions légales au secret médical, ce qui implique que le professionnel de santé peut ou doit divulguer des informations précises. C’est notamment le cas de la déclaration des
naissances ou des décès, ou encore des signalements au procureur de la République de sévices ou privations, la transmission d’informations concernant un mineur en danger etc.

Par ailleurs, le respect du secret dû au patient ne s’arrête pas à son décès.

Le secret médical est d’ordre public. Ainsi, c’est une norme impérative, et le juge peut s’auto-saisir si une violation du secret médical venait à sa connaissance, même si le patient n’a pas
préalablement saisi le juge. C’est une obligation générale et absolue.

Les personnes ayant la qualité d’ayant-droit peuvent avoir un accès à une partie du dossier médical du patient décédé.

En ce sens, il est rappelé dans l’article L. 1111-7 du CSP :

« En cas de décès du malade, l’accès au dossier médical de ce malade des ayants droit, du concubin, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou du médecin prenant en charge une
personne susceptible de faire l’objet d’un examen des caractéristiques génétiques dans les conditions prévues au I de l’article L. 1130-4 s’effectue dans les conditions prévues aux deux
derniers alinéas du V de l’article L. 1110-4. »

À son tour, l’article L. 1110-4 du CSP précise que :

« Le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit (…) dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. Toutefois, en cas de décès d’une personne mineure, les titulaires de l’autorité parentale conservent leur droit d’accès à la totalité des informations médicales la concernant, à l’exception des éléments relatifs aux décisions médicales pour lesquelles la personne mineure, le cas échéant, s’est opposée à l’obtention de leur consentement dans les conditions définies aux articles L. 1111-5 et L. 1111-5-1. »

Ainsi, il ressort de ces dispositions que, sauf si le patient a exprimé son refus avant son décès, les ayants droit de celui-ci peuvent avoir accès à une partie du dossier médical pour l’un des trois motifs suivants :

  • Connaitre les causes de la mort ;
  • Défendre la mémoire du défunt ;
  • Faire valoir leurs droits.

La jurisprudence considère de façon constante que le législateur a entendu autoriser la communication aux ayants droit d’une personne décédée des « seules informations nécessaires à la réalisation de l’objectif poursuivi ».

Ainsi, à ce titre, la CADA a été amenée à considérer que les médecins apprécient l’adéquation des pièces communiquées aux motifs invoqués par les demandeurs, mais n’apprécient pas l’opportunité de la communication de tout ou partie du dossier.

Par ailleurs, sauf pour le motif relatif aux causes de la mort, les ayants droits doivent justifier les raisons de leur demande, afin d’aiguiller l’équipe médicale dans l’identification du ou des documents nécessaires à la poursuite de l’objectif correspondant au motif invoqué.

Les actes de décès sont quant à eux librement communicables, sauf exception, au titre de l’article 26 du Décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l’état civil :

« A l’exception des actes de décès dont la communication est de nature à porter atteinte, compte tenu des circonstances du décès, à la sécurité des personnes qui y sont désignées (…) les actes de décès sont librement communicables conformément à l’article L. 213-1 du code du patrimoine ».

Responsabilité civile et pénale d’un patient violent et de l’établissement

Hypothèse de la responsabilité du patient

D’un point de vue civil, le principe énoncé à l’article 1240 du Code civil est que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

En outre, l’article R. 1112-49 du CSP prévoit que :

« Lorsqu’un malade, dûment averti, cause des désordres persistants, le directeur prend, avec l’accord du médecin chef de service, toutes les mesures appropriées pouvant aller éventuellement jusqu’au prononcé de la sortie de l’intéressé. »

Au regard de la situation d’espèce, ce dernier article ne trouverait à s’appliquer en raison du caractère persistant des désordres devant être causés, et d’un malade dûment averti.

Cependant, il énonce un principe à portée générale, sans apporter de précisions quant aux personnes ayant commis des dégradations sous l’empire d’une altération ou d’une abolition du discernement. Dans ce cadre, il est nécessaire de se reporter au régime de droit commun de la responsabilité.

En application des règles de droit civil en matière de responsabilité du fait personnel, toute personne ayant causé un dommage à autrui alors qu’elle était sous l’empire d’une altération ou d’une abolition du discernent n’en est pas moins obligée à réparation . En effet, le juge judiciaire estime en ce sens que l’article 414-3 du Code civil ne prévoit aucune responsabilité particulière et s’applique à toutes les responsabilités prévues aux articles 1240 et suivants du Code susvisé.

D’un point de vue pénal, le paragraphe 2, de la Section 1 issue du Chapitre II, du Titre II du Livre II de la partie législative réprime les violences volontaires.

La répression est modulée en fonction de la durée de l’incapacité de travail découlant de la violence, et de la qualité de la victime.

Ainsi, à titre d’exemple, pour une violence ayant entrainé une ITT supérieure à huit jours, le Code pénal prévoit une répression de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende . La violence est punie de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende lorsqu’elle est commise notamment sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.

Les violences ayant entraîné une infirmité permanente sont en outre punies de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende , et 15 ans de réclusion criminelle lorsqu’elles sont commises sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur.

Cependant, le Code pénal exclut la responsabilité pénale des personnes atteintes, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli leur discernement ou le contrôle des actes.

Lorsque ce trouble a altéré le discernement ou entravé le contrôle des actes, la personne demeure punissable, mais la répression devra être adaptée à cette situation, en application des dispositions prévues à l’article 122-1 alinéa 2 du Code pénal.

Hypothèse de la responsabilité de l’établissement

En application des dispositions combinées des articles L. 1110-1 et L. 1142-1 du CSP, les établissements et les professionnels de santé sont débiteurs d’une obligation de sécurité à l’égard
des patients qu’ils prennent en charge.

Cette obligation se décline notamment sous la forme d’une obligation de surveillance , laquelle fait partie intégrante des missions imparties aux établissements de santé.

Le médecin est également tenu d’une obligation de suivi, d’accompagnement et de surveillance du patient. En cas de dommage subi par un patient, le médecin, s’il est mis en cause à titre personnel, devra ainsi prouver qu’il avait bien satisfait à ces obligations.

De jurisprudence constante, l’obligation de surveillance mise à la charge des établissements est une obligation de moyens, et non une obligation de résultat.

En effet, sauf exception, la responsabilité civile des établissements et professionnels de santé n’est pas encourue de plein droit, le patient devant rapporter la preuve d’une faute commise au cours ou au décours de la prise en charge.

L’établissement devra, quant à lui, être en mesure de démontrer qu’une surveillance adaptée a été mise en oeuvre (d’où l’importance de traçabilité au dossier médical). À défaut, il serait réputé ne pas avoir accompli les diligences nécessaires pour garantir la sécurité du patient.

L’obligation incombant à l’établissement et/ou au praticien sera toutefois appréciée plus ou moins strictement en fonction de la nature et spécialité de l’établissement et de l’état de santé du patient et de l’identification, le cas échéant, d’un risque spécifique dans sa prise en charge.

En effet, la jurisprudence retient que « l’obligation de surveillance s’analyse en une obligation de prudence et de diligence dont les exigences varient suivant l’état du patient ».

La responsabilité sera ainsi appréciée au cas par cas, en tenant compte d’un faisceau d’indices pour établir les possibilités qu’avait l’établissement d’identifier et prévenir la réalisation du risque.

Quant à la responsabilité pénale des établissements de santé, elle est à conjuguer avec le principe de droit pénal français selon lequel « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ».

Cependant, les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou leurs représentants , même si la « responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ».

Ainsi, ce n’est que si une infraction est reconnue à l’encontre d’un organe ou représentant de l’établissement qu’il pourra en être tenu responsable pénalement.

Conclusion

La demande doit normalement émaner de la victime elle-même ou de son représentant, ou d’une réquisition judiciaire. Le certificat médical initial n’a pas vocation à être communiqué aux tiers. Les ayants droit peuvent cependant avoir accès aux documents du dossier médical, dans les conditions prévues par la loi.

Enfin, plusieurs responsabilités pourront être recherchées, mais leur issue est incertaine, au vu de la probable irresponsabilité pénale du patient violent, et de la nécessité de prouver une faute de l’établissement de santé.

L’établissement devra, quant à lui, être en mesure de démontrer qu’une surveillance adaptée a été mise en oeuvre (d’où l’importance de traçabilité au dossier médical). À défaut, il serait réputé ne pas avoir accompli les diligences nécessaires pour garantir la sécurité du patient.

L’obligation incombant à l’établissement et/ou au praticien sera toutefois appréciée plus ou moins strictement en fonction de la nature et spécialité de l’établissement et de l’état de santé du patient et de l’identification, le cas échéant, d’un risque spécifique dans sa prise en charge.

En effet, la jurisprudence retient que « l’obligation de surveillance s’analyse en une obligation de prudence et de diligence dont les exigences varient suivant l’état du patient ».

La responsabilité sera ainsi appréciée au cas par cas, en tenant compte d’un faisceau d’indices pour établir les possibilités qu’avait l’établissement d’identifier et prévenir la réalisation du risque.

Quant à la responsabilité pénale des établissements de santé, elle est à conjuguer avec le principe de droit pénal français selon lequel « nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ».

Cependant, les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou leurs représentants , même si la « responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ».

Ainsi, ce n’est que si une infraction est reconnue à l’encontre d’un organe ou représentant de l’établissement qu’il pourra en être tenu responsable pénalement.

Conclusion

La demande doit normalement émaner de la victime elle-même ou de son représentant, ou d’une réquisition judiciaire. Le certificat médical initial n’a pas vocation à être communiqué aux tiers. Les ayants droit peuvent cependant avoir accès aux documents du dossier médical, dans les conditions prévues par la loi.

Enfin, plusieurs responsabilités pourront être recherchées, mais leur issue est incertaine, au vu de la probable irresponsabilité pénale du patient violent, et de la nécessité de prouver une faute de l’établissement de santé.

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