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Réquisition judiciaire et transmission de rapport circonstancié

Rappel de l'objet de la demande

Un établissement nous interroge sur les conditions de transmission d’un rapport circonstancié faisant suite à une réquisition judiciaire.

De manière plus précise, l’établissement souhaite savoir s’il est dans l’obligation de déférer à cette réquisition mais aussi de savoir les éléments devant figurer au sein du rapport demandé notamment à l’égard des tiers.

Textes de référence

  • Code de procédure pénale (CPP), articles 60, 60-1, 77-1, 77-1-1, 99-3 ;
  • Code pénal (CP), articles 226-14, 434-3, R. 642-1 ;
  • Circulaire Crim. 2004-04 E8/14-05-2004 du 14 mai 2004 : présentation des dispositions de procédure pénale immédiatement applicables de la Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

Réponse

Une réquisition judiciaire se définit comme un ordre de l’autorité publique à une personne physique ou morale d’accomplir un acte ou une prestation et pour lever, dans certains cas, le secret professionnel. Il convient tout de même de distinguer selon l’objet de la réquisition :

  • Les réquisitions ayant pour objet des constatations, des examens techniques ou scientifiques ;
  • Les réquisitions ayant pour objet la saisie d’un dossier médical ;
  • La réquisition ayant pour objet la remise d’informations couvertes par le secret.

Sur la forme juridique de la réquisition

Le cadre juridique de la réquisition dépend avant tout du cadre de l’enquête, à savoir que dans le cadre d’une enquête de flagrance, l’officier de police judiciaire à seul le pouvoir pour recourir toute personne qualifiée pour procéder à ces constatations, examens techniques ou scientifiques . Dans cette hypothèse, aucun formalisme n’est requis, le législateur ayant précisé que cette réquisition pouvait être adressée « par tout moyen ». Cela signifie donc, que la réquisition peut être faite à l’oral, il conviendra alors d’être prudent, de s’assurer de l’identité du demandeur et de l’étendue de la réquisition afin de permettre la bonne tenue du dossier au sein de l’établissement de santé.

En revanche, si les officiers de police judiciaire agissent dans le cadre d’une enquête préliminaire, ils ne peuvent agir que sur autorisation du Procureur de la République ce qui implique par conséquent un formalisme plus important. Plusieurs mentions doivent figurer au sein de l’acte et notamment le cadre juridique de l’enquête, l’article de référence, l’identité de la personne requise, l’objet de la réquisition et la signature du rédacteur.

Sur l’objet de la réquisition

La réquisition peut avoir pour objet d’obtenir le témoignage du personnel soignant sur des faits qui ont été connus dans le cadre de leur activité professionnelle, comme tel est le cas en l’espèce. Il peut alors s’agir à certains égard d’éléments couverts par le secret professionnel, puisque la réquisition peut porter sur des éléments qui ont été portés à la connaissance du personnel soignant à l’occasion de leur exercice professionnel.

D’une manière plus générale, le Code de procédure pénale dispose que l’officier de police judiciaire, le procureur de la République ou le juge d’instruction selon le cadre de l’enquête, peut requérir de toute personne ou de tout établissement susceptibles de détenir des informations intéressant l’enquête de les lui remettre sans que puisse lui être opposée, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel.

Le pouvoir contraignant des réquisitions

Afin d’assurer le pouvoir contraignant de la réquisition, en cas de refus non justifiée de toute personne, autre qu’un médecin, celle-ci encourt une amende de 150 euros. Cette amende est portée à la somme de 3 750 euros lors d’un refus non légitime émanant d’un médecin.

Cependant certaines hypothèses permettent de justifier le refus d’un médecin, et dans votre cas d’espèce, lorsqu’il n’a pas les compétences requises pour effectuer la mission demandée par exemple.

Cependant ces exceptions sont davantage évoquées dans le cadre de réquisition portant sur une demande de constatations, ou d’examen technique puisqu’elles peuvent concerner également le fait que la personne concernée n’est pas en état de subir un examen médical, ou si la personne concernée par la réquisition a déjà fait l’objet de soins par le professionnel sollicité par les autorités judiciaires.

Dans le cas spécifique d’une réquisition ayant pour objet la remise d’informations couvertes par le secret médical, la Circulaire du 14 mai 2004 est venue préciser que les médecins relevaient des professions protégées et qu’à ce titre, ils bénéficiaient de règles spécifiques destinées à préserver les principes fondamentaux garantissant l’exercice de la profession, et notamment eu égard au secret médical.

En conséquence, et pour le seul cas particulier des médecins, le professionnel a alors le choix d’accepter ou de refuser de remettre les informations demandées en application d’une réquisition judiciaire. Alors, il ne pourra être sanctionné par une amende s’il refuse, toute comme il ne pourra se voir reprocher une violation du secret professionnel s’il accepte.

Cependant, il faut bien comprendre que seul le médecin, peut se retrancher devant cette faculté de choix à condition bien évidemment qu’il s’agisse d’informations couvertes par le secret professionnel. Néanmoins, qu’importe son choix, il doit cependant faire connaître sa réponse à la réquisition.

Pour les professionnels qui ne sont pas médecins, le législateur précise tout de même une exception : l’existence d’un motif légitime. Mais pour l’heure ni le législateur, ni la jurisprudence n’ont pris la peine de définir le motif légitime. Il conviendra alors d’apprécier la situation au regard de la nature de l’infraction pour laquelle l’enquête est ouverte.

Dans le cadre des réquisitions judiciaires, les éléments remis aux forces de l’ordre doivent être expurgés des informations qui ne concernent pas la personne visée par l’enquête, de même ces documents doivent concernés la demande indiquée dans la réquisition ainsi que le contexte dans lequel elle a été faite. Il faut concilier les nécessités de l’enquête avec la vie privée des personnes ayant accordées leur confiance aux professionnels tenus au secret. Cependant, dans le cadre d’une demande de réquisition ayant trait à des faits pouvant constituer des infractions pénales, il est nécessaire de mentionner la personne auteur et les victimes, pour ne pas faire entrave au bon déroulement de l’enquête.

Il convient également de rappeler qu’en vertu de l’article 226-14 du Code pénal, le professionnel a parfois l’obligation de lever le secret professionnel et de révéler des faits appris dans le cadre de ses fonctions. En effet, des dérogations sont prévues le législateur considérant ainsi que l’intérêt général se trouvait, pour certaines situations, dans la communication de l’information plutôt que dans la préservation du secret.

Ainsi, le secret professionnel n’est pas applicable à :

  • A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;
  • Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l’être, les sévices ou privations qu’il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, son accord n’est pas nécessaire.

D’une manière plus générale, l’article 434-3 du Code pénal impose également une obligation de dénoncer à quiconque a connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou d’atteintes sexuelles infligés à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, d’une maladie, d’une infirmité, d’une déficience physique ou psychique ou d’un état de grossesse.

Conclusion

La réquisition judiciaire emporte par principe un pouvoir contraignant.

Le médecin peut cependant refuser de déférer à la réquisition judiciaire se prévalant du secret médical, toute comme les professionnels peuvent invoquer un motif légitime faisant obstacle à la remise des informations demandées.

Cependant, il ne faut pas oublier que dans certaines hypothèses, et notamment dans le cadre d’infractions pénales, les professionnels sont amenés à lever le secret professionnel afin de protéger des personnes qui peuvent être considérées comme vulnérables.

Le législateur insiste alors pour que s’opère une véritable conciliation entre le secret professionnel qui s’attache à certaines professions et activités, et la protection des intérêts de la société qui passe nécessairement par la protection des plus vulnérables.

 

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