Le circuit du médicament en Ehpad repose principalement sur la collaboration des membres de l’équipe pluridisciplinaire de l’établissement. Chaque mois, l’équipe d’Hospimedia Réponse expert* apporte son décryptage juridique sur un sujet d’actualité.
Pour assurer leurs missions, les Ehpad doivent disposer d’une équipe pluridisciplinaire dont la composition est fixée par voie réglementaire. Celle-ci comprend a minima :
- un professionnel infirmier titulaire du diplôme d’État (IDE) ;
- des aides-soignants ;
- des accompagnants éducatifs et sociaux ;
- des personnels psycho-éducatifs.
L’administration et l’aide à la prise de médicaments en Ehpad sont strictement encadrées par des protocoles et par le Code de la santé publique. Dans ce cadre, cette étape du circuit du médicament demeure sous la pratique et la responsabilité de l’infirmier en collaboration avec d’autres professionnels de santé.
Les actes pratiqués par les IDE
Les infirmiers sont habilités à pratiquer les actes listés aux articles R4311-5 et R4311-7 du Code de la santé publique, en application d’un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin. Dans ce cadre, ils accomplissent les actes d’administration des médicaments, correspondant à un ensemble d’étapes successives consistant à prendre connaissance de la prescription médicale, à préparer le traitement adéquat, à le distribuer auprès du patient, à l’aider à le prendre et à en assurer l’enregistrement.
Plus précisément, l’aide à la prise du médicament présenté sous forme non injectable — qualifiable de mise en bouche — consiste à faire prendre le traitement au résident et à l’aider à effectuer les gestes nécessaires, par exemple, avaler une pilule avec un verre d’eau, diluer un sachet, etc. Ensuite, il appartient à l’IDE de procéder à la vérification de la prise de médicaments, la surveillance de leurs effets et d’assurer l’accompagnement éducatif de la personne. À noter qu’un contrôle équivalent doit être réalisé à la suite de la pose d’un dispositif transdermique (patch).
Cependant, d’autres professionnels y apportent leur concours selon leurs domaines d’activité.
Les actes pratiqués par les autres professionnels
Conformément à l’article R4311-4 du Code de la santé publique, dans les établissements ou services à domicile à caractère sanitaire, social ou médico-social, les aides-soignants, les auxiliaires de puériculture ou les accompagnants éducatifs et sociaux peuvent, sous la responsabilité d’infirmiers, collaborer avec ces derniers à l’accomplissement d’actes et soins relevant de leur rôle propre.
Quid des agents de services hospitaliers ?
À l’égard des agents de services hospitaliers, le juge administratif a pu estimer que ces derniers ne peuvent participer à cette collaboration dans le circuit du médicament. En effet, ces agents ne font pas partie de l’équipe soignante, mais sont en charge de l’entretien et de l’hygiène des locaux. Leur participation aux actes de la vie courante ne concerne que le cadre de vie du patient et son confort matériel (cour administrative d’appel de Nantes, Loire-Atlantique, 22 mars 2018).
L’infirmier chargé de toute fonction de coordination ou d’encadrement veille à la bonne exécution des actes accomplis par ces professionnels, dont il coordonne ou encadre l’activité. Il veille à la compétence des personnes qui lui apportent leur concours. Cependant, il est nécessaire de procéder à une mise en garde contre l’erreur médicamenteuse. Par analogie avec le secteur sanitaire, il est utile de retenir que celle-ci peut être définie comme « l’omission ou la réalisation non intentionnelle d’un acte au cours du processus de soins impliquant un médicament, qui peut être à l’origine d’un risque ou d’un événement indésirable pour le patient« , selon un arrêté du 6 avril 2011 applicable aux établissements de santé.
En effet, l’établissement est tenu, au titre de son obligation de sécurité de moyens (article L311-3 du Code de l’action sociale et des familles), de prévenir les erreurs liées à la manipulation relevant de l’aide à la prise des médicaments.
Conformément aux recommandations de la Haute Autorité de santé, il est avisé d’appliquer la règle dite des 5 B, consistant à « administrer au bon patient, le bon médicament, à la bonne dose, sur la bonne voie, au bon moment« .
Le cas des médicaments classés stupéfiants
Un médicament classé stupéfiant peut-il être dispensé par un aide-soignant en l’absence de l’IDE ? Conformément aux dispositions énoncées par les articles R4311-1 à R4311-5 du Code de la santé publique, il n’est pas fait obstacle à ce que l’aide-soignant puisse réaliser « l’aide à la prise des médicaments présentés sous forme non injectable« . Néanmoins, l’administration d’un médicament classé stupéfiant, ne peut être qualifiée comme un soin courant de la vie quotidienne au sens de l’article L313-26 du Code de l’action sociale et des familles, permettant à l’aide-soignant de le réaliser en dehors de la présence de l’IDE.
Sur ce point, le juge a récemment eu l’occasion de se prononcer en appel, en estimant que l’administration d’un produit non injectable à base de morphine classé stupéfiant par une aide-soignante est contraire aux dispositions réglementaires des articles R4311-1 et suivants du Code de la santé publique (cour d’appel de Nîmes, Gard, 7 juin 2023). In fine, afin d’assurer la sécurisation du circuit du médicament, toute administration à un résident d’un produit stupéfiant, notamment d’un morphinique, ne peut être réalisée par un aide-soignant par délégation d’un infirmier que lorsque ce dernier peut en assurer le contrôle effectif.
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