La loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alerte impose la mise en œuvre d’une procédure interne par les établissements. Chaque mois, l’équipe d’Hospimedia Réponse expert* apporte son décryptage juridique sur un sujet d’actualité.
En 2013 et 2016, deux vecteurs législatifs ont apporté de premières protections aux lanceurs d’alerte. Il s’agit de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et la loi dite Sapin II du 9 décembre 2016. Toutefois, ces mesures se sont avérées insuffisantes. Pour combler les lacunes, la loi du 21 mars 2022 a transposé en droit français une directive européenne d’octobre 2019. Elle élargit le champ des bénéficiaires du statut protecteur de lanceur d’alerte et simplifie les modalités de signalement de faits illicites.
Pour qu’un professionnel d’un établissement sanitaire ou médico-social à même de connaître un état de fait illicite ou dangereux le dénonce en interne, son employeur doit avoir mis en place une procédure de recueil et de traitement des alertes. Pour connaître les contours de ce dispositif, les structures ont dû attendre le 3 octobre 2022 et la publication du décret relatif aux procédures de recueil et de traitement des signalements et fixant la liste des autorités externes autorisées à traiter les alertes. Ce texte vise notamment les établissements sociaux, médico-sociaux et de santé de droit public et de droit privé employant au moins cinquante agents ou salariés, à l’exception des établissements publics rattachés aux communes de moins de 10 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale qui ne comprennent parmi leurs membres aucune commune excédant ce nombre d’habitants.
Mise en œuvre de la procédure interne de signalement
Les établissements concernés doivent consulter au préalable leur comité social et économique afin de choisir l’instrument juridique dans lequel ils décident d’inscrire la procédure de signalement : accord collectif, note de service, etc. La procédure doit instaurer un canal de réception des signalements qui peut être oral ou écrit en fonction de ce que prévoit la procédure. L’article 4 du décret précise que si les signalements peuvent être faits par oral, ils devront se faire :
- par appel téléphonique ;
- par messagerie vocale ;
- lors d’une visioconférence ;
- lors d’une rencontre physique.
Recueil et traitement des alertes
La procédure de signalement interne doit indiquer la ou les personnes, le ou les services en charge du recueil et du traitement de ces alertes. Au sein des établissements de santé et médico-sociaux visés à l’article L5 du Code général de la fonction publique, le référent déontologue peut être chargé du recueil et du traitement des signalements.
Le décret précise que cette procédure peut être gérée par des personnes ou services différents. Elle peut être à la charge d’un tiers, en externe. Par ailleurs, les structures de moins de 250 salariés peuvent prévoir une procédure commune de recueil et de traitement des alertes après une décision concordante de leurs organes compétents.
Quel que soit le choix retenu, les structures sont tenues de respecter des garanties d’impartialité et de confidentialité. Elles doivent aussi respecter certaines obligations en matière de retranscription des signalements afin que leur auteur puisse lire et rectifier au besoin le procès-verbal. L’établissement dispose de sept jours ouvrés pour accuser réception du signalement, qu’il soit oral ou écrit.
Vérification de la conformité
Sauf si le signalement est anonyme, l’employeur est tenu de vérifier que les conditions de l’exercice du droit d’alerte — précisées par la loi du 9 décembre 2016 — sont remplies : qualité et bonne foi de l’auteur, objet de l’alerte, absence de contrepartie directe, etc. À cet égard, il peut demander tout complément d’information. Le cas échéant, l’établissement doit indiquer au lanceur d’alerte les raisons pour lesquelles il estime que son signalement ne respecte pas les conditions requises, ainsi que les suites données.
Assurer le traitement des alertes
Lorsque les conditions de l’exercice du droit d’alerte sont remplies, l’employeur doit aussi assurer leur traitement. Il peut, afin d’évaluer l’exactitude des allégations, demander tout complément d’information à l’auteur. Lorsqu’il considère que les allégations sont avérées, il doit mettre en place les moyens permettant de remédier à l’objet du signalement. Dans le cas contraire, il procède à la clôture de l’alerte et doit l’archiver.
À compter de l’accusé de réception, l’établissement a trois mois pour fournir, par écrit, un retour d’information à l’auteur de l’alerte. Ce retour concerne les mesures envisagées ou prises pour évaluer l’exactitude des allégations et le cas échéant, pour remédier à l’objet du signalement. Lorsque les allégations s’avèrent inexactes ou infondées, ou lorsque le signalement est devenu sans objet, l’entité procède à sa clôture. L’auteur en est informé par écrit.
Accessibilité de la procédure
La procédure interne de recueil et de traitement des alertes doit être diffusée par tout moyen assurant une publicité suffisante, notamment par voie de notification, affichage ou publication, dans des conditions permettant de la rendre accessible de manière permanente aux personnes susceptibles de l’utiliser.
En outre, la loi du 21 mars 2022 impose aux établissements de santé et médico-sociaux pourvus d’un règlement intérieur d’y faire figurer l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alerte. Ces établissements doivent également mettre à la disposition de leurs personnels des informations claires et facilement accessibles concernant les procédures de signalement externe.
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