Possible, mais encadré, le cumul d’activités suppose le respect de certaines démarches, tant pour l’agent que pour son employeur. Chaque mois désormais, l’équipe d’Hospimedia Réponse expert apporte son décryptage juridique sur un sujet d’actualité sur HOSPIMEDIA.
Réformé à plusieurs reprises, le cadre juridique du cumul d’activités dans la fonction publique continue de susciter des interrogations multiples. Si la loi n’exclut pas une telle possibilité, l’exercice d’une activité secondaire n’en demeure pas moins un simple régime de tolérance. Perspective d’un complément de revenus ou volonté des agents d’apporter leur concours à d’autres structures durant la crise sanitaire, le champ des possibles et des interdits reste relativement méconnu. Or l’absence d’information par leur employeur quant à leurs obligations ne saurait dispenser les agents du strict respect des règles. Décryptage.
Une interdiction de principe
Les textes de la fonction publique prévoient une interdiction de cumul d’activités (article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983). Tout agent public, titulaire comme contractuel, est tenu de se consacrer intégralement à son emploi public, il ne peut exercer une activité privée lucrative, de quelque nature que ce soit, en parallèle.
Cette obligation d’exclusivité constitue une mesure de protection du service public. Tout manquement aux règles de cumul expose les agents à trois degrés de sanction, pleinement cumulables entre elles :
- le reversement des sommes indûment perçues (retenue sur traitement) ;
- une sanction disciplinaire ;
- des poursuites pénales.
Des hypothèses de cumul strictement encadrées
Par dérogation, un agent peut être autorisé à cumuler une activité, en sus de son activité publique principale, mais uniquement dans certains cas légalement et limitativement définis. Ces exceptions, listées à l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983, sont au nombre de cinq.
La première dérogation concerne le dirigeant d’une société ou d’une association à but lucratif, reçu à un concours ou recruté en tant que contractuel. L’agent a la possibilité de poursuivre cette activité privée pendant une durée d’un an, renouvelable une fois. Ce cas de figure ne nécessite qu’une simple déclaration écrite de l’agent à l’employeur, dès sa nomination ou préalablement à la signature de son contrat.
L’agent occupant un emploi à temps non complet (quotité ≤ 70%) peut également exercer une ou plusieurs activités privées lucratives en dehors de ses obligations de service, sous réserve que cela soit compatible avec les fonctions qu’il exerce. Une simple déclaration préalable écrite de l’agent à chacun de ses employeurs est ici suffisante. L’employeur public doit informer l’agent de cette possibilité de cumul.
Un agent occupant un emploi à temps complet peut solliciter un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise ou pour exercer une activité privée lucrative, notamment à titre libéral. Une demande d’autorisation préalable est nécessaire, accordée pour une durée de trois ans. Elle est renouvelable pour un an après dépôt d’une nouvelle demande, présentée au moins un mois avant l’expiration de la première autorisation.
La quatrième dérogation concerne l’exercice d’une activité accessoire, lucrative ou non. Quelle que soit sa quotité de temps de travail, tout agent peut demander à exercer, en dehors de ses obligations de service, une ou plusieurs des activités accessoires limitativement énumérées à l’article 11 du décret du 30 janvier 2020 (expertise et formation, enseignement, activités sportives et culturelles, activité de conjoint collaborateur, pour n’en citer que quelques-unes). Ces activités peuvent être exercées y compris sous le statut d’auto-entrepreneur (statut obligatoire pour les services d’aide à la personne et la vente de produits fabriqués par l’agent). Une demande d’autorisation préalable est là encore nécessaire, sauf pour les activités bénévoles auprès de personnes publiques ou privées à but non lucratif, dont l’exercice est libre.
Enfin, la cinquième et dernière exception porte sur la production d’œuvres de l’esprit ou à caractère artistique. Ces activités s’exercent librement, sans autorisation ni déclaration.
Examen des demandes et modalités de contrôle
En tout état de cause, il est impératif d’informer l’employeur public ou de demander son accord préalable — selon que l’activité est soumise à déclaration ou à autorisation expresse — avant de débuter tout cumul. Selon le cas de figure, plusieurs informations et justificatifs doivent être transmis par l’agent. L’employeur doit ensuite s’assurer que l’activité est compatible avec les missions exercées par l’agent, et qu’il n’existe pas de conflit d’intérêts. En effet, le cumul d’activités ne se conçoit que si l’activité annexe de l’agent ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance, à la neutralité du service ou aux principes déontologiques.
L’administration doit accuser réception de la demande de l’agent. Elle dispose d’un délai de deux mois (un mois s’il s’agit d’une activité accessoire) pour accorder ou refuser le cumul lorsque celui-ci est soumis à autorisation préalable. Elle doit notifier sa décision par écrit. En l’absence de décision expresse dans ce délai, la demande d’autorisation est réputée rejetée.
Une fois accordée, l’autorisation peut comporter des réserves et ne vaut que pour une durée limitée. Elle n’est jamais définitive puisque l’administration peut toujours, et à tout moment, s’opposer au cumul d’activités ou à sa poursuite :
- si l’intérêt du service le justifie ;
- si le cumul est ou devient incompatible avec l’emploi ou les obligations déontologiques de l’agent ;
- si l’agent a fourni des informations inexactes ;
- en cas de prise illégale d’intérêts.
Le contrôle de l’employeur s’effectue principalement a priori, au stade de la demande initiale, au besoin en saisissant le référent déontologue ou la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il peut également intervenir en cours d’autorisation, ceci afin d’évaluer si la poursuite du cumul reste compatible avec l’intérêt du service ou pour tenir compte d’éventuels changements (degré d’implication de l’agent dans son activité principale, situation au regard des effectifs dans la structure, évolution des missions de l’agent, etc.). À ce titre, l’employeur peut exiger de l’agent qu’il communique ponctuellement le relevé de ses activités extérieures et des rémunérations s’y rattachant.
Et dans le secteur privé ?
Contrairement au régime strict régissant le cumul d’activités dans le secteur public, les salariés de droit privé peuvent cumuler plusieurs emplois, y compris à temps complet, sans autorisation préalable. Cette faculté reste néanmoins soumise à trois principales restrictions :
- la durée totale des emplois salariés ne doit pas excéder les durées maximales de travail (soit 10h par jour et 48h par semaine), cette limitation ne concerne toutefois pas le cumul d’une activité salariée avec une activité non salariée, libérale ou indépendante ;
- le cumul est interdit en présence d’une clause d’exclusivité dans le contrat du salarié ou, plus généralement, si la situation conduit le salarié à méconnaître son obligation de loyauté envers son employeur principal, même si aucune clause ne le prévoit ;
- le cumul est prohibé pour certaines activités, en raison d’incompatibilités professionnelles (encadrement des activités commerciales des professionnels de santé par exemple).
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