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Responsabilité de l’EHPAD face aux sorties organisées par les proches en unité protégée

Rappel de l'objet de la demande

La sortie en promenade ou pour activité de résidents d’une unité protégée au sein d’un EHPAD en dehors de cette unité, effectuée par des visiteurs extérieurs à l’établissement, interroge le cadre de responsabilité de la structure. Comment se positionner par rapport à cette problématique ?

Textes de référence

• Code de l’action sociale et des famille (CASF), articles L. 311-3, L. 311-4-1 et Annexe 3-9-1.

Réponse

Le principe intangible de liberté d’aller et venir

Pour rappel, la liberté d’aller et venir est un principe à valeur constitutionnelle.

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789 fonde cette liberté : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de cesmêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi » .

La Haute Autorité de Santé (HAS) précise que :

« La liberté d’aller et venir d’une personne (…) accueillie dans un établissement médico-social ne doit pas être entendue seulement comme la liberté de ses déplacements à l’intérieur de l’établissement, mais aussi comme la possibilité pour elle de mener une vie ordinaire au sein de l’établissement qu’elle a elle-même choisi. Cette liberté s’interprète de manière extensive et prend appui sur les notions d’autonomie, de vie privée et de dignité de la personne».

Egalement, la Charte des droits et libertés de la personne âgée en situation de handicap ou de dépendance insiste sur l’importance du choix de vie puisqu’elle prévoit en son premier article que :

« Toute personne âgée devenue handicapée ou dépendante est libre d’exercer ses choix dans la vie quotidienne et de déterminer son mode de vie. Elle doit bénéficier de l’autonomie que lui permettent ses capacités physiques et mentales, même au prix d’un certain risque. Il convient de la sensibiliser à ce risque, d’en tenir informé l’entourage et de proposer les mesures de prévention adaptées. La famille et les intervenants doivent respecter le plus possible le désir profond et les choix de la personne, tout en tenant compte de ses capacités qui sont à réévaluer régulièrement ».

La sécurité des résidents

Les EHPAD sont débiteurs d’une obligation de sécurité à l’égard de leurs résidents . Il s’agit d’une obligation de sécurité de moyens . La sécurité des résidents doit donc être adaptée à leurs besoins et à leur santé, et l’établissement doit mettre tout en oeuvre pour garantir une telle sécurité. À ce titre, le juge a confirmé qu’un EHPAD n’a qu’une obligation de moyens et non de résultat à l’égard des pensionnaires, ce qui justifie qu’il n’a ni à garantir leur surveillance continue, ni à prévoir un dispositif spécial de sécurité pour les actes imprévisibles.

Le cas échéant, la responsabilité des EHPAD ne peut donc être engagée qu’en cas de faute dans la surveillance du résident.

Enfin, l’Annexe 3-9-1 du CASF précise que la sécurité du résident recouvre :

Les fragilités particulières du résident liées à son état de santé ;

Et le degré dans lequel celles-ci doivent être prises en considération pour mettre en œuvre l’exercice de sa liberté d’aller et venir.

La nécessité de concilier sécurité et liberté d’aller et venir

Conformément au CASF, les EHPAD, y compris les unités protégées, doivent garantir l’exercice des droits et libertés individuels à toutes les personnes prises en charge. Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, leur sont notamment assurés, le respect de leur dignité, de leur intégrité, de leur vie privée, de leur intimité, de leur sécurité et de leur droit à aller et venir librement.

La liberté d’aller et venir est donc à concilier avec le principe de sécurité.

Dans cette logique le CASF permet d’annexer au contrat de séjour du résident des mesures particulières à prendre, pour assurer l’intégrité physique et la sécurité de la personne et pour soutenir l’exercice de sa liberté d’aller et venir.

L’annexe au contrat de séjour intervient au regard des responsabilités de l’établissement vis-à-vis du résident.

Ces mesures individuelles particulières ne sont prévues que :

dans l’intérêt des personnes accueillies ;

si elles s’avèrent strictement nécessaires ;

et ne doivent pas être disproportionnées par rapport aux risques encourus .

Ces trois critères sont cumulatifs. Les restrictions envisagées doivent être exceptionnelles et l’établissement ne peut pas agir selon un principe de précaution continu.

En pratique, ces mesures sont définies après examen du résident et au terme d’une procédure collégiale mise en œuvre à l’initiative du médecin coordonnateur de l’établissement ou, en cas d’empêchement du médecin coordonnateur, du médecin traitant.

Cette procédure associe l’ensemble des représentants de l’équipe médico-sociale de l’établissement afin de réaliser une évaluation pluridisciplinaire des bénéfices et des risques des mesures envisagées. Le contenu de l’annexe au contrat de séjour peut être révisé à tout moment, selon la même procédure, à l’initiative du résident, du directeur de l’établissement ou du médecin coordonnateur ou, à défaut de médecin coordonnateur, du médecin traitant, ou sur proposition de la personne de confiance si elle a été désignée .

Toujours dans le cadre de ces mesures individuelles, l’Annexe 3-9-1 du CASF indique expressément qu’elles peuvent concerner en particulier l’entrée dans l’établissement, la circulation dans l’établissement, notamment l’accès aux terrasses et jardins et les sorties en dehors de l’établissement.

En outre, cette Annexe rappelle que ces mesures doivent conserver, voire promouvoir dès que possible, la liberté d’aller et venir et l’autonomie du résident. Elles doivent être spécifiques à la situation particulière du résident, proportionnées à ses besoins et strictement nécessaires à la garantie de la protection de son intégrité physique et de sa sécurité. Pour chacune de ces mesures, le directeur de l’établissement est tenu de rechercher, chaque fois que nécessaire avec la participation du médecin coordonnateur, le consentement du résident pour leur mise en œuvre.

Conclusion

Afin d’assurer la sécurité de vos résidents en unité protégée, il est possible d’adopter certaines mesures. En effet, un dispositif prévu par le CASF permet d’annexer au contrat de séjour des mesures individuelles particulières. Dans ce cadre, il est notamment permis d’adopter une telle mesure pour les sorties en dehors de l’établissement afin d’assurer l’intégrité physique et la sécurité du résident et pour soutenir l’exercice de sa liberté d’aller et venir.

Toutefois, outre l’intérêt du résident, il faut assurer que la limitation des sorties en dehors de l’enceinte de l’établissement ou dans l’enceinte de l’établissement mais en dehors de l’unité protégée avec de tels visiteurs et par le biais de ces mesures sont strictement nécessaires et proportionnées par rapport aux risques encourus pour le résident et votre établissement.

Ainsi, même dans le cadre de ces mesures il faut se positionner de manière à concilier la liberté d’aller et venir avec la sécurité du résident. C’est-à-dire en tenant compte de ses fragilités particulières liées à son état de santé et du degré dans lequel celles-ci doivent être prises en considération pour mettre en œuvre l’exercice de sa liberté d’aller et venir.

Enfin, en cas de contentieux, ce n’est que dans le cadre d’une faute dommageable que votre responsabilité serait engagée.

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